La montagne (extrait) - Blog de Xavier Bruckert littérature

Or un jour que la troupe cheminait, ils furent saisis par un paysage que leurs yeux mêmes eurent peine à croire. Cela leur vint en haut d’une crête à l’herbe rase. Devant eux, ils virent un massif énorme fait de pics acérés qui s’élançaient plus haut encore que les nuages accrochés à leurs flancs. A leurs pieds, la terre était d’un blanc étincelant qui aveuglait comme le soleil. Des taches du même blanc étincelant étaient posées par endroits sur les parois et la roche semblait d’un noir plus profond que la nuit. Ici, la terre ne ressemblait plus à la terre que les hommes connaissaient, la montagne elle-même n’était plus rien que des falaises abruptes où rien ne semblait vivre. Toute la journée, ils restèrent immobiles sur la crête pour contempler ce chaos. Quand vint le soleil couchant, sur les taches blanches, s’allumèrent des flammes orangées et sur les parois sombres des flammes d’un rouge profond. Et quand vint la nuit, les pics devenus d’immenses flammes de pierre rougeoyèrent longtemps au-dessus de l’obscurité qui avait englouti le reste du monde visible.

Le Chant des Hommes